Lionel Roulier
L’art de combattre n’est pas simple, oh bien sûr il suffit de monter sur le ring se jeter à l’eau et avec le temps on arrive un peu à se défendre, à attaquer et parfois à réussir de belles actions dignes des films de Donnie Yen, ou alors on oublie le ring et on fait du Wing Chun.
Mais le Wing Chun étant un art de combat qui ne suit pas les mêmes chemins d’apprentissage que les autres arts martiaux, et encore moins les sports de combat, il n’est pas toujours facile de se rendre compte de son vrai niveau de combattant en pratiquant le Chi Sao, si l’on garde nos critères de jugement basés sur ce que l’on a eu l’habitude de voir dans les matchs de boxe, les combats de MMA.
Alors comment savoir où on en est et si l’on avance ? comment être sûr que l’on est sur le bon chemin ? Pour ma part pas de mystères, je me réfère au système d’apprentissage du Wing Chun et à sa philosophie pour trouver les réponses à ces questions.
Avant tout, il faut savoir que c’est au début de l’apprentissage de la deuxième forme du système Wing Chun le Cham Kiu. Il est dit dans la tradition qu’il faudra trois fois plus de temps de pratique sur cette forme que sur les formes Siu Lim Tau ou le Biu Jee. Cela tient au fait que dans le Cham kiu, nous allons devoir acquérir ce que l’on nomme les trois ponts de liaison. Je vous rappelle que « Cham Kiu » signifie « chercher le/les pont/s ».
C’est bien souvent aussi à partir de cette forme que l’on va commencer à pratiquer le Chi Sao.
Lorsqu’un pratiquant de Wing Chun arrive au Cham Kiu, il détient normalement les bases du Guo Sao, du Puen Sao et du Lat Sao qu’il a vues dans la première forme, le Siu Lim Tau. Ces trois idées de base permettent de comprendre les 2 premières notions fondamentales que l’on va retrouver en combat, la notion de distance et la notion de temps, plus généralement appelées timing dans le milieu des sports de combat.
Ensuite partant de ces deux notions, il va falloir l’intégration d’une troisième donnée hyper importante, l’adversaire. Nous avons maintenant les trois critères qui vont nous permettre de juger de notre capacité en combat :
- La distance, trop loin vous n’êtes pas puissant, trop près vous êtes susceptible d’être accroché par l’adversaire. Bien sûr en fonction de votre distance vous n’allez pas employer les mêmes techniques. Si vous êtes près de l’adversaire il faudra utiliser les coups de coudes ou de genoux, mais si vous êtes encore plus proche il faudra utiliser les amenés aux sols. Tout cela pose la question : quelles distances maitrisez-vous réellement ?
- Le temps (timing), une demi-seconde trop tard et votre action est inefficace, une demi seconde trop tôt et là aussi votre coup de poing a l’effet d’un pétard mouillé. Cette notion du temps juste est vraiment difficile à acquérir mais sans la maitrise du temps, impossible de lire le combat. La question qui doit venir est : suis-je en avance ou en retard sur mes actions ?
- L’adversaire, savoir lire l’adversaire est un must, si vous ne comprenez pas ce que fait l’adversaire, s’il est capable de gérer la distance, le temps et vos techniques vous avez affaire à plus fort que vous. La question que l’on doit se poser : suis-je capable de lire l’adversaire ?
Le Wing Chun classe vos réponses en fonction de trois niveaux de capacité.
Le premier est le niveau Pont Flottant « Fao Kiu » Ce niveau est ce que l’on nomme le niveau de l’errance ou de l’illusion, c’est le niveau où la maitrise est la plus basse. C’est le moment dans le combat ou vous agissez sans trop de réflexion, par instinct, et donc la compréhension de ce qui se passe n’est pas développée.Vous donnez des coups de poing et des coups de pied en espérant que cela va toucher à un moment ou un autre, beaucoup de pratiquants « Wing Chun » appellent ce niveau le « Lucky strike », le coup gagnant. C’est un combat où l’un ou l’autre des combattants peut avoir ce coup heureux qui met l’adversaire KO. Il n’y a dans ce niveau pas ou peu de maitrise des trois critères (distance, temps, adversaire)
Dans le Chi Sao, c’est lorsque vous ne contrôlez pas grand-chose, vous essayez juste de toucher.
Le deuxième niveau est le niveau Pont Séparé « San Kiu » Ce niveau est appelé le niveau de sensibilisation, c’est le niveau intermédiaire où la compréhension des critères de distance, de temps et de lecture de l’adversaire commence à être appliquée, mais où il y a difficulté à harmoniser les trois critères.
C’est dans ce niveau que l’on pourra par exemple voir des pratiquants réussir à se placer à bonne distance mais la technique choisie sera mal appropriée et sera à contretemps pour réussir à être efficace, ou vice versa que la technique choisie sera bien à propos mais employée trop près ne sera pas assez puissante pour vraiment prendre l’avantage.
Dans le Chi Sao, c’est lorsque vous avez la capacité d’essayer des actions mais que dans la plupart des cas elles donnent peu de résultats.
Et le dernier niveau est le niveau Pont Eternel « Wing Kiu »Le troisième niveau est celui de la concentration, c’est le dernier niveau celui de l’illumination, le plus haut niveau en combat.
Dans ce niveau le pratiquant est capable d’harmoniser les trois critères, il se place à bonne distance, emploie la bonne technique au bon moment et a su le faire en lisant l’adversaire.
Dans le Chi Sao, c’est le moment où vous contrôlez vos actions et quelles atteignent leurs objectifs.
Vous voilà avec de nouveau critères et les niveaux de jugement qui vont avec, je vous invite à y penser et vous poser les bonnes questions qui vous feront progresser.
Si vous souhaitez commencer le Wing Chun :
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